dimanche 15 avril 2012

Le charme à la française, première partie


Cent figures licencieuses à la gloire des Dames romaines
Paris, éditions Borderie, 1980, 126 pp., in-8, couverture cartonnée pleine toile verte d'éditeur.
25€.
Ce septième volume de la collection "Images Obliques", émanation de la célèbre revue Obliques, est un recueil de cent gravures françaises du 18ème siècle. Il comprend "l'Académie des dames" à Venise, chez Pierre Arétin, "Monumens du culte secret des Dames romaines", "le Décaméron" de Jean Boccace, ainsi qu'une dernière section présentant "quatorze détails" empruntés aux sujets précédents.
En outre, Michel Camus signe une préface fort utile, en ce qu'elle nous éclaire sur les diverses supercheries qui accompagnent l'histoire de ces gravures et, plus généralement, des textes qu'elles illustrent superbement.
Nous sont livrés ici les fantasmes liés à cette époque, tels que la bestialité, le droit de cuissage, la fornication entre religieux libertins (avec ces sexes dressés comme des crucifix)... On y perçoit un goût pour l'amour gueux et bucolique, avec des villageoises, dans les champs ou les granges. Les scènes d'orgie sont également bien représentées et on décèle un intérêt balbutiant pour le sexe exotique, en provenance des colonies.
En outre, l'éducation sexuelle des enfants semblait plus directe, en ces âges où l'expression "tenir la chandelle" conservait toute la puissance de son sens.

1) L'académie des dames


2) Monumens du culte secret des dames romaines




3) Le Décaméron


Concluons en faisant nôtres les mots de Michel Camus : "la seule grâce des gravures libertines, leur aisance qui n'obéit qu'au libre jeu de l'imagination érotique (dans le dessin comme dans la vie) n'est-elle pas de nature à nous délivrer, ne fût-ce que le regard d'un instant, du poids de l'existence et des lamentations de ces bien-pensants que Boccace - à la fin de son Décaméron - appelle les bigottes !"

jeudi 12 avril 2012

A venir : le charme à la française

En préparation, un petit sujet sur la représentation charnelle, l'érotisme et la pornographie en France, du 18è siècle à aujourd'hui (à peu près).
A ce propos, voici un extrait de l'introduction de Pauline Barnet au recueil de photographies intitulé Cent nus 1900 (dont sont extraites les deux photos ci-jointes), que nous présenterons plus en détail bientôt : "la vulgarité ou l'amour, la laideur ou le désir juste n'ont évidemment pas d'époque d'élection. Bien entendu, les mœurs varient d'un siècle à l'autre et la pornographie contemporaine est arrivée à des sommets que ne semblaient pas préparer ces nus "artistiques". Mais même dans ce nouveau domaine, on retrouve la différence entre ce qui fait preuve de goût et ce qui en manque : nous avons pu consulter des représentations de fellations, vulgaires et dégoûtantes, et d'autres, gourmandes et belles. L'art n'est pas dans un fait, ni dans un état de la civilisation, il est dans une éthique et dans un don cultivé."

mercredi 2 novembre 2011

Pornografia all'italiana

Les magazines érotico-porno italiens furent, au cours des années 70 et 80, de véritables catalogues des fantasmes sexuels de cette période. En effet, plus que dans les publications d'autres nationalités, les parutions italiennes aimaient compiler toutes sortes de pratiques et d'obsessions : sexe avec des nonnes, amour inter-ethnique, zoophilie, homosexualité (sexe aussi bien gay que lesbien), sadomasochisme, urophilie, sexe amateur, femmes rondes...
Souvent, dans le même titre, se côtoyaient des images salaces, hardcore (voire limite crades...) et des photographies soft, de facture très léchée. Tout était fait pour que le lecteur érotomane y trouve son compte, quelques soient ses fantasmes. Il en résulte une carte troublante et riche de l'imaginaire érotique de l'époque.
Là où au Danemark, en France ou encore en Allemagne, on assistait à une hyper-spécialisation des mags, souvent en Italie on embrassait tout dans un même élan de désir et de pulsion, d'où un sentiment de vertige éprouvé à feuilleter ces revues.

Petit florilège :

Vero n°4, erotismo vero (début 80 ?).
Magazine en état moyen : un cahier débroché (sans doute quelques pages manquantes), 10€.
Une longue séquence de 40 pp. entre une hôtesse de l'air et son capitaine,
une autre (9 pp.) mettant en scène un trio (deux hommes blacks et une femme blanche),
puis le retour d'un avion au cours d'un dernier "reportage" (25 pp.) titré "acrobazie in cielo e in terra", très bucolique : un couple, puis un deuxième homme, et un aviateur exécutant des acrobaties au-dessus d'eux.
Plus quelques pages assez savoureuses (où l'on aperçoit furtivement Marilyn Jess, Richard Allan, ou encore John Holmes), dont cette belle fin présentant un modèle très disco !

























Lolita n°12 (fin 70). Etat correct. 15€. Vendu !
Un magazine qui brasse vite et large, même si on peut dire que ce numéro se penche massivement sur le sadisme et le lesbianisme. On y croise aussi deux femmes et un poney, des crânes, des nonnes, des poitrines opulentes, de la bédé éroticomique, un horoscope hot... et une pub bien graphique pour une revue sadomasochiste.

























OV n°35, Ora Verita (1975). 64 pp. N&B et couleurs. Etat correct (usure d'usage). 15€.
Un mag qui commence avec un sujet sur le "voyeurismo" et qui va enchaîner les situations et dérouler les possibilités : couple hétéro, triolisme (deux femmes et un homme), puis deux femmes (auxquelles se joindra une troisième), puis triolisme à nouveau (sexe oral) et re-triolisme, etc.
De ce magazine suinte le charme suranné des années 70, le kitsch saute aux yeux à chaque photo (ah, les décors !), les typos sont garanties total vintage et les mises en scène paraissent aujourd'hui gentiment naïves et... fun !

























Men n°6
, 1977, 80 pp., N&B et couleurs. Etat moyen. 15€.
Ce mag ouvre sur un sujet brûlant, qu'on peut traduire par "elle trahit la cause pour une bite en or" et qui donne la parole (façon de parler hein, la plupart du temps dans ces publications rien n'est vrai, même si quasi tout est permis), la parole donc à une ex-féministe allemande, qui ne regrette rien. Serait-ce là le signe clair des questionnements des hommes quant à leur identité, leur virilité ? En tout cas, à cette époque la masculinité vivait de grands bouleversements. Le féminisme se voit donc ici transformé en objet insolite de désir.
Suit un récit de voyage "très fin" (hum...), qui parle de Birmanie et de "pute", illustration de l'intérêt pour le sexe exotique. Men ne fait pas dans la dentelle !
Si ce magazine, souvent vulgaire, s'adresse clairement aux machos (autre titre d'article : "il gusto dell'uomo forte"), certaines photos sont magnifiques et, étonnamment, on trouve quelques articles dignes d'intérêt (notamment celui sur la belle et la bête, ou un autre sur l'ouverture à Madrid d'une pornothèque). Clairement, dans Men le meilleur côtoie le pire. L'effet catalogue mentionné en introduction produit des résultats surprenants !